Phonétique française

Si le signifiant se décompose en unités minimales, elles ne sont pas identiques dans toutes les langues. Le français contemporain sélectionne par exemple un système de phonèmes différent de celui d’autres langues (ce qui rend difficile la pratique phonétique de langues étrangères). Il s’agit bien d’un système, dans la mesure où les phonèmes du français se maintiennent et gardent leur cohérence malgré les différences individuelles ou régionales de prononciation (d’un point de vue synchronique).

Les phonèmes et graphèmes du français contemporain

Les phonèmes du français contemporain se distinguent en voyelles et consonnes (voire semi-consonnes quand elles ont une composante vocalique).

Voyelles

Les voyelles du français contemporain ne sont pas nombreuses : a, ɑ, æ, e, ɛ, i, o, ɔ, u, y, ə, œ, ø, ã, ɔ (avec tilde), ε (avec tilde), œ (avec tilde), ã. Elles se distinguent surtout par leur point d’articulation (voyelles d’avant, d’arrière), et leur aperture (voyelles ouvertes ou fermées), auxquelles s’ajoute la nasalisation. La transcription graphique constitue en elle-même un système fortement historique – et qui contribue au « charme » de l’orthographe. Mais les phonèmes ne correspondent pas aux phones, c’est-à-dire aux sons réels que l’on peut enregistrer et qui relèvent de variations individuelles, ou communautaires (jusqu’à une région, d’où la notion d’accent).

Consonnes et semi-voyelles

Les consonnes et semi-voyelles du français sont les suivantes :

Ce tableau n’appelle guère de remarques, sinon que le /r/ vélaire est localement remplacé par un -r roulé /ʁ/, à considérer comme un phone, en ce qu’il n’est pas un phonème du français7.

Les questions de transcription graphique sont moins variées que pour les voyelles, à cela près que les consonnes peuvent se dédoubler (se dupliquer serait plus exact). Ainsi /p/ se transcrit [p] ou [pp] : pli, opposition. Le cas est similaire pour /t/, /b/, /d/, /g/, /m/, /n/, /r/, /l/.

Le phonème /k/ se transcrit assez rarement [k], mais le plus souvent [c] ou [cc] : couvent, baccalauréat, voire [ch] et [cch] : archéologie, ecchymose.

Le phonème /g/ se transcrit [g] ou [gu] (s’il est suivie d’un -e ou d’un -i).

Le phonème /f/ se transcrit en [f] ou [ff], mais aussi en [ph].

Le phonème /s/ se transcrit en [s], [ss], [sc], [c], [ç], voire en [x] dans taxi, /taksi/.

Le phonème /z/ se transcrit en [z], [s] intervocalique : rose, voire en [x] : exercice, /egzersis/.

Le phonème /ʒ/ se transcrit en [j], [ge] : jaune, geai, voire [g+e] ou [g+i] : plongeon, vigie.

Le phonème /j/ se transcrit en [ill], [il], ou [y] intervocalique : grenouille, œil, croyez.

Les phonèmes /w/ et /ɥ/ sont souvent classés comme semi-voyelles (ainsi que /j/). Si le phonème /ɥ/ n’apparaît que combiné au phonème /i/, comme dans huile / ɥil/, le phonème /w/ connaît une plus grande extension. Il se transcrit en [w] watt /wat/ ; [oi], combiné avec le phonème /ɑ/ : bois, ou [oî] : cloître. Il se combine aussi avec /u/ : oui/wui/, douane ; et avec /ɛ (avec tilde)/ : soin.

Le phonème /ɲ/ ne figure que pour des mots anglais partiellement francisés comme parking, meeting. Mais string se prononce plutôt /strin’g/.

Le graphème h, à l’initiale d’un mot, -h dit « aspiré » mérite examen. Il n’est plus aspiré depuis longtemps (l’a-t-il été ?), il est dit qu’il fut expiré, mais on le marque actuellement par l’hiatus et l’absence de liaison : des haricots /dɛ|arico/, le haut /lə|o/. Pour les mots d’origine latine, l’-h graphique n’a aucune incidence sur la prononciation : l’herbe /lerb/, les herbes /lɛzerb/. Enfin, en combinaison graphique avec le -c voire le -s, il transcrit le phonème /ʃ/.

Les signes diacritiques

Ces signes, moins nombreux en français que dans d’autres langues, n’apparaissent qu’à l’écrit. Ce sont tout d’abord les accents qui « chapeautent » les voyelles (les consonnes ne sont pas concernées).

Discussion (éléments pour une)

Cette description (amendable) appelle quelques remarques.

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1- Sauf pour femme : /fam/, et pour les adverbes comme évidemment.

2- L’histoire des accents relève de celle de la transcription manuscrite et de celle de l’imprimerie, donc de celle des codifications.

3- Le contexte d’emploi, voire la « séquence » du signifié, remplacent la distinction effacée par la prononciation. Le système phonétique ne tient en effet que par sa conjonction à d’autres systèmes, et notamment au signifié.

4- Ce sera nuancé par l’examen du phonème /j/ et de ses transcriptions graphiques.

5- Tels que : je, ce, le, me… Mais à l’oral il tend à être élidé : j’le vois, ça m’fait +X. Toutefois il n’y a pas de cas de deux élisions successives (ce qui serait imprononçable) : j’me tourne ou je m’tourrne.

6- En région, les deux phonèmes tendent à se confondre au profit de /ɛ avec tilde/.

7- Mais il est peut-être plus ancien que le /r/ vélaire.

8- Il se dit que les protes (ouvriers imprimeurs) n’ayant qu’une quantité limitée de -s dans leur casse furent à l’origine de l’usage de l’accent circonflexe pour économiser des -s. Les imprimeurs y ont trouvé intérêt.

9- Mais s’agit-il de phonèmes ou de phones ? Et il a été également suggéré que l’enfant serait sensible aux sons maternels dès avant sa naissance au jour. Il émergerait donc dans un contexte phonétique prédéfini : celui de la langue naturelle maternelle, qui, fondée sur des distinctions oppositives entre phonèmes, restreint le champ des phones potentiels par l’expression et le renforcement des phones (et des phonèmes) réalisés.

10- Le français contemporain ne comporte pas réellement de diphtongues, à la différence d’autres langues européennes.

11- Le concept de voyelles nasales en français a été défini pour la première fois en 1694 par l’abbé de Dangeau dans ses Essais de grammaire. La notion en fut reprise et précisée en 1767 par Nicolas Beauzée, qui est le premier à définir la nasalité par rapport à l’oralité. Ainsi, il écrit dans sa Grammaire générale que les articulations nasales sont celles « qui font refluer par le nez une partie de l’air sonore dans l’instant de l’interception, de manière qu’au moment de l’explosion il n’en reste qu’une partie pour produire la voix articulée, » tandis que les articulations orales sont celles « qui ne contraignent point l’air sonore de passer par le nez dans l’instant de l’interception, de manière qu’au moment de l’explosion tout sort par l’ouverture ordinaire de la bouche ». Wikipédia.